L'être et le paraître en gastronomie.

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L'être et le paraître en gastronomie.

Un titre des Echos paru ce vendredi, « fruits et légumes, les enseignes organisent la revanche des moches. » m’a d’autant plus interpellé que depuis quelque temps déjà j’avais projeté de vous proposer un article intitulé :«l’être et le paraître en gastronomie ».

Cette opposition est évidemment un lieu commun en philosophie mais n’a pas fait l’objet, me semble-t-il, d’une réflexion portant sur les aliments. Jusqu’à cet article des Echos tout au moins, qui indique que des grandes surfaces  expérimentent la vente de produits « déformés », ces fruits et légumes mis au rébus pour …défaut d’aspect, avec à la clé un gain de 30% sur les prix habituels.

La nourriture c’est notre quotidien absolu, au moins trois fois par jour (pour ceux qui en ont les moyens) et l’un des registres les plus exploités par le marketing et le packaging. Notre immersion dans un environnement d’images et de slogans où la concurrence entre les enseignes fait rage, nous a fait insensiblement ranger la nourriture au même rang que les objets usuels en privilégiant leur apparence plutôt que leur contenu. Il s’en est suivi tout naturellement une inflation des prix sans que pour autant la qualité soit en rapport.

C’est une dérive inconsciente qui est à l’origine de bien des excès alimentaires dans la mesure où ce sont les industriels de l’agroalimentaire qui mènent le bal et que la défense de leurs marges commerciales prime sur la qualité nutritionnelle de leur production.

Être et paraître semblent donc, conformément au sens commun, s’opposer. L’être peut en effet se définir comme le besoin vital de se nourrir avec des aliments naturels qui ne demandent pas de transformation sophistiquée, voire alambiquée. Le paraître est par contre soumis à un changement continuel et perpétuel.

Et c’est là que ce situe un des pièges majeurs de la modernité et de la vie trépidante qu’elle a engendrée. Le temps consacré à la restauration ayant considérablement rétréci pour des raisons multiples ( contraintes professionnelles, absence de repas familiaux, problèmes financiers…) nous aurons vu se multiplier, quasiment à l’infini, des propositions d’ingrédients, de recettes et de conditionnements où le marketing est roi.

En effet, sous prétexte d’offres alimentaires répondant à tous les profils sociaux,  à toutes les circonstances de la vie quotidienne ou encore tous les modes de cuisson et de conservation , le superflu a pris le dessus occasionnant même un gâchis considérable de nourriture.

Et que dire de la sécurité alimentaire souvent bafouée de manière grave et spectaculaire.

La gastronomie quant à elle, qui est une forme évoluée de nutrition et qui, par définition, est garante de traditions et de pratiques culinaires avérées, n’échappe pas à cette crise du paraître.

Dans notre société du spectacle permanent il était inévitable que ce domaine soit lui aussi investi, provoquant une sorte de théâtralisation de la nutrition avec des notes à payer sans aucune mesure avec le contenu réel des assiettes.

Alors, pouvons-nous réellement échapper à cette main-mise des industriels sur notre besoin vital de nourriture ?


Car avant que de paraître il est urgent d’être aux commandes de notre destinée tant il est vrai que les problèmes de nutrition et de santé seront sans aucun doute un sujet constant de préoccupation.

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